Salariés protégés, managers ou dirigeants inhibés ?

La protection des salariés, les risques psycho-sociaux et les situations dites de « harcèlement » sont des questions qui ont pris une part croissante dans les préoccupations des managers ; ces risques sont indéniablement de mieux en mieux pris en compte dans les organisations. 

Une étude récente du cabinet RH Empreinte Humaine et Opinion Way sur la santé mentale des salariés français indiquerait que 34% des salariés seraient en burn-out (36 % des ‘télétravailleurs’, sur un panel représentatif de 2001 personnes interrogées). 

De mes dernières interventions dans des Comex, Codir ou auprès de managers, est régulièrement apparue cette question : comment pouvons-nous aujourd’hui exercer notre autorité managériale sans nous mettre nous-même en danger au regard des risques psychosociaux à l’égard de nos salariés ? 

En effet, le management peut lui-même se sentir déstabilisé dans ses exigences, alors qu’il subit une pression constante liée aux risques psychosociaux, ou plus simplement au désengagement des salariés (dans l’étude précédemment citée, « le travail est important dans la vie » pour seulement 19% des personnes interrogées en 2022 contre 70% en 1999 !). 

Le manager se sent bien souvent tiraillé entre la nécessité d’atteindre des résultats collectifs ambitieux, conditions de ‘survie’ de l’entreprise, couplée à sa responsabilité de ‘faire grandir’ ses collaborateurs, et le besoin de les protéger d’une trop grande charge ou pression. 

Ces mécanismes peuvent conduire à des impasses. Par exemple, pour ne pas risquer de blesser’ un collaborateur, un manager se garde d’exprimer la moindre demande ou la moindre critique. La déception s’installe, le ressentiment et les griefs s’accumulent, avant qu’une crise n’éclate après plusieurs mois d’incompréhensions.  

Dans d’autres cas, le simple fait de donner des consignes peut être ressenti comme une attitude trop directive, sans que l’intention ait quelque ressort d’autoritarisme, mais tout simplement de cadrage de l’activité. 

Comme dans toute relation non paritaire, c’est à dire hiérarchique, il est clair que la personne en situation d’autorité ne mesure pas toujours l’impact de son positionnement et doit être particulièrement vigilant(e) quant à l’effet produit par ses demandes ou injonctions. 

Les récentes révélations sur les abus d’autorité, dans différents contextes, ont douloureusement rappelé cette réalité.

Alors que faire ? Comment (re)trouver ce subtil équilibre entre une position qui cadre et oriente et le respect et l’écoute auquel tout un chacun a droit ? 

Les recettes miracles qui s’appliquent systématiquement n’existent pas, comme le prétendent certains manuels de management.  

Il s’avère plus que jamais nécessaire d’être dans un dialogue constructif et permanent qui ne renie pas l’ambition partagée, mais donne une voie à l’expression des besoins ou difficultés pour atteindre les objectifs fixés, et de se mettre dans une posture d’écoute active des signaux faibles.  

De manière plus concrète, il importe de : 

 - se montrer très vigilant pour ne pas exprimer d’éventuelles injonctions contradictoires - celles qui désarçonnent par leurs antagonismes irréconciliables - 

- avoir un constant souci du dialogue

- interroger, questionner de manière ouverte pour identifier les attentes et les besoins des membres de son équipe

- se mettre en posture de négociation permanente  

- ne pas quitter le rôle de manager et les responsabilités qui lui sont associées, c’est-à-dire celles qui permettent de développer ses collaborateurs par des exigences ajustées et respectueuses. 

Un subtil équilibre, toujours à retravailler.

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